HomeA la uneL’UA ET LA DEMOCRATIE EN AFRIQUE : Tant que le président de la  Commission sera un commis expéditionnaire…

L’UA ET LA DEMOCRATIE EN AFRIQUE : Tant que le président de la  Commission sera un commis expéditionnaire…


 

C’est, aujourd’hui, 30 janvier 2017, que s’ouvre à Addis-Abeba, en Ethiopie, le 28e sommet de l’Union africaine (UA). Les 54 pays membres se pencheront les 30 et 31 janvier, sur la réintégration du Maroc, le renouvellement des instances de la Commission de l’Union et les réformes. Par rapport au premier point, c’est-à-dire le retour du Royaume chérifien au sein de la grande famille africaine, l’on peut dire que Mohamed VI en a fait un point d’honneur. Et pour que la voix du Maroc soit entendue et comprise, le souverain chérifien n’a pas lésiné sur les moyens. D’abord, au cours de l’année 2016, il a mis en route une opération diplomatique de charme en direction de l’Afrique au Sud du Sahara. Dans ce cadre, des pays comme le Ghana, membre fondateur de l’OUA, l’ancêtre de l’UA, Madagascar, le Nigeria et la Tanzanie, ont reçu la visite du Roi. Dans le même registre, l’on peut évoquer le mini- sommet panafricain que Mohamed VI a organisé en marge de la COP 22. A cette offensive diplomatique, l’on peut ajouter les partenariats économiques que Rabat a multipliés sur le continent.

La réintégration du Maroc est pratiquement actée

Ces deux approches, peut-on dire, convergent vers un même but : repositionner le Royaume sur l’échiquier africain de sorte à rallier à sa cause le plus grand nombre possible de pays membres et ce, d’autant plus qu’une majorité des deux tiers est requise pour sa réintégration. A ce propos, le chef de la diplomatie du Maroc, Salaheddine Mezouar, a, d’ores et déjà, annoncé que 40 pays sur les 54 pays membres, soutenaient le Royaume. Si l’on en croit donc Rabat, la réintégration du Maroc est pratiquement actée. Mais la réintégration du royaume est une chose et la suspension de la République arabe Sahraouie démocratique (RASD), qui demeure une volonté sans équivoque du palais, en est une autre. C’est à ce niveau que Rabat risque de déchanter. En effet, la RASD compte des avocats et non des moindres au sein de l’UA. Et au nombre de ceux-ci, l’on peut citer l’Afrique du Sud et l’Algérie qui, on le sait, ne comptent pas pour du beurre au sein de l’UA. De ce point de vue, l’on pourrait s’attendre à un choc de tirades, qui, si l’on n’y prend garde, risque d’aboutir à un clash. Par rapport au renouvellement de la Commission, là aussi, les choses ne seront pas simples. En ce qui concerne particulièrement la succession de Dame Nkosazana Dlamini-Zuma, la bataille risque d’être âpre. En effet, non seulement l’on enregistre une pléthore, peut-on dire, de candidats, mais aussi chaque sous-région de l’Afrique fait des pieds et des mains pour que son représentant rafle la mise. C’est ce qui explique, entre autres, qu’en juillet 2016 à Kigali, l’organisation n’avait pas trouvé son élu. Cette fois, sont dans les starting-blocks, la Botswanaise Pelonomi Venson, la Kényane Amina Mohamed, le Tchadien Moussa Mahamat, l’Equato-Guinéen Mba Mokuy et le Sénégalais Abdoulaye Bathily. Pour l’instant, le nom du dernier cité semble émerger du lot, mais seuls les chefs d’Etat et de gouvernement en décideront lors du vote prévu pour se tenir demain. Et comme l’on sait que pour accéder à cette prestigieuse fonction, la condition est d’obtenir les deux tiers des votes nécessaires, l’on peut prendre le risque de parier que l’apparition de la fumée blanche, a de fortes chances de traîner avant de se manifester. Et cela illustre, s’il en est encore besoin, l’incapacité chronique de l’Afrique à parler d’une seule voix face aux grands défis qui interpellent le continent. Et l’un de ces grands défis est incontestablement la promotion d’une gouvernance politique de qualité. Sur la question, l’UA a du chemin à parcourir.

Les questions qui fâchent les prédateurs de la démocratie, seront habilement esquivées

En son sein, en effet, les prédateurs attitrés de la démocratie ne se comptent plus. Et ils sont bruyants et influents au point que les voix acquises à la cause de la démocratie, ont du mal à se faire entendre. Dans ces conditions, que peut faire un président de la Commission de l’UA qui est animé de la volonté de faire de cette Organisation, un instrument au service des peuples ? Dans le meilleur des cas, il ne peut que se défouler de temps en temps en chargeant les cancres de la démocratie du continent, comme l’a fait, en son temps, le Malien  Alpha Konaré. Mais de cela, les  satrapes d’Afrique n’en ont cure. En effet, ils sont conscients que le président de la Commission de l’UA n’est qu’un commis expéditionnaire, image qui renvoie à cette personne qui, pendant la période coloniale, était chargée uniquement de recopier les actes et les états administratifs. Et tant que le président sera confiné dans ce rôle de faire-valoir, il ne saurait représenter nullement une menace pour la confrérie des dictateurs. Malheureusement, l’honneur est revenu à l’un d’eux, Paul Kagame pour ne pas le nommer, lors du précédent sommet à Kigali, en juillet 2016, de piloter une commission chargée de réformer l’UA. A cet effet, il s’est entouré de neuf éminents conseillers venus de toute l’Afrique. Sans préjuger du contenu de ce travail qui sera dévoilé aux chefs d’Etat à l’occasion de ce sommet, l’on peut prendre le risque d’affirmer que les questions qui fâchent les prédateurs de la démocratie, seront habilement esquivées. Pour donner l’impression que son équipe a fait œuvre utile pour l’Afrique, Paul Kagamé, en bon « souverainiste », comme la plupart des dictateurs d’Afrique, invitera l’Afrique à délier les cordons de la bourse pour se prendre en charge. Cela n’est pas mauvais en soi. Mais aux yeux des dictateurs, cela pourrait se lire comme une invite à l’Occident à  ne pas se préoccuper du sort de la démocratie en Afrique. Et le simple fait d’entendre cela, peut faire jubiler des présidents comme Robert Mugabé, Pierre Nkurunziza et autres Yoweri Museveni. Et la liste est loin d’être exhaustive.

« Le Pays »


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