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MARDI POLITIQUE


Le 24 décembre dernier, nous avions rendez-vous avec l’un des principaux hommes politiques du Burkina Faso, à son domicile à Ouagadougou. A l’heure du rendez-vous, 9h, nous étions sur place mais visiblement, l’agenda de notre interlocuteur s’annonçait chargé puisque des visiteurs étaient déjà en attente pour être reçus en audience. Après quelques minutes de patience, nous verrons l’homme sortir, détendu et nous accueillant sur un ton de plaisanterie. Notre photographe, Aristide Ouédraogo, a été notamment invité à sauter dans la piscine pour apprendre à nager. Visiblement, notre chasseur d’images n’avait pas la tête à sauter dans une piscine. L’interlocuteur dont il est ici question n’est autre que Eddie Komboïgo, président du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP). Pendant près de deux heures d’horloge, nous avons échangé, sans tabou, avec lui, sur l’actualité nationale. Lisez plutôt !

 

« Le Pays » : Nous sommes à la veille de la fête de Noël. Quant à la fête du Nouvel An, c’est dans quelques jours. Comment la famille Komboïgo va-t-elle vivre ces fêtes ?

 

Eddie Constance Komboïgo : C’est vrai que cette fête, comme on le dit, nous rappelle la Nativité. C’est une fête de foi et comme je suis un homme de Dieu, je suis un homme de foi. La famille Komboïgo également. J’appartiens à la paroisse Saint Camille. Je vais prier ce soir 24 décembre et demain 25 pour la famille Komboïgo, certainement pour la santé, la vigueur, la réussite, et pour le peuple burkinabè qui vit des moments difficiles ; ce peuple meurtri, assassiné. L’année 2021 a été encore plus atroce que les années précédentes à cause de l’insécurité. Donc, nous allons invoquer Dieu pour qu’il vienne nous secourir.  Nous allons prier pour que la paix revienne dans notre pays. Nous allons prier Dieu pour qu’il aide les veuves, les orphelins, les personnes déplacées qui vivent actuellement des situations précaires et très difficiles. Que la grâce de Dieu soit avec eux.

 

Beaucoup de Burkinabè n’ont pas la tête à la fête. Qu’avez-vous à dire à ceux qui ont de quoi fêter ?

 

Je vous ai dit que c’est une fête de foi. Ce n’est pas un moment festif ; c’est une commémoration de la foi. Si vous avez écouté, dans ma première réponse, j’ai évoqué le cas de ceux qui sont dans les situations difficiles. Et cela va au-delà des victimes de l’insécurité et de la pandémie du Covid-19. Le Burkina Faso vit une situation très déplorable où il y a plus de 8 millions de personnes qui vivent dans l’extrême pauvreté sur une population d’environ 20 millions. Cela représente quasiment la moitié de la population. Cette pauvreté s’est aggravée du fait des conséquences de la pandémie du Covid-19 et celles de la guerre parce qu’on n’investit pas dans un pays où il y a la guerre. A cause de la pandémie, les appuis et les investisseurs ont réorienté leurs fonds dans le domaine médical et ailleurs. Nous n’avons pas pu créer de la valeur ajoutée avec des investissements nouveaux pour sortir ces populations de la misère. C’est pourquoi nos prières vont également à l’endroit de ces gens et à l’endroit des gouvernants pour qu’ils aient la force et le courage de relancer l’économie au profit de notre pays et de ses habitants.

 

Comment se porte le CDP post-8e congrès tenu les 18 et 19 décembre derniers ?

 

Le CDP se porte très bien du fait qu’il a pu organiser son congrès et de ce fait, ne sera pas dans l’illégalité. Nous avons un parti qui tient son congrès tous les trois ans. Le dernier congrès ordinaire du CDP, date de mai 2018. Naturellement, en mai 2021, nous devrions tenir le congrès. Mais à l’approche de cette date en février 2021, le Secrétariat permanent (un groupe de personnes issues du Bureau politique national y compris les vice-présidents) a proposé de reporter le congrès en novembre, compte tenu du fait que nous sommes sortis des élections en novembre 2020 et qu’il y a une grande déception bien que nous soyons Chef de file de l’opposition ; ils demandent de laisser les militants se reposer. Nous avons soumis le dossier au Bureau exécutif national (BEN) qui a accepté la proposition. Mais comme l’organe de décision, c’est le Bureau politique national, nous avons donc convoqué un BPN qui a pris la décision de reporter le congrès en novembre. Mais, nous savions que même si on dépassait la date, il y avait un délai de grâce et c’est pourquoi nous nous étions permis de reporter le congrès.  Après la saison pluvieuse en septembre, nous nous sommes réunis avec tous les organes (secrétariat permanent, Bureau exécutif national, Bureau politique national) et nous avons demandé à planifier le congrès. Avant de tenir la session du BEN, des jeunes nous ont précédés pour organiser une conférence de presse sans fond qui a entrainé des problèmes. Quel était le fond du problème ? Il faut que je vous le dise aujourd’hui pour que vous le sachiez. Nous avons permis aux jeunes de faire leur déclaration mais dans cette déclaration, il y avait un appel à réinstaurer la peine de mort. Or, nous nous sommes battus avec les Burkinabè pour mettre fin à la peine de mort dans notre pays. Nous leur avons dit qu’ils ne pouvaient pas parler de peine de mort aujourd’hui car, même en guerre, nos militaires ne capturent pas les ennemis. Ils tirent également sur eux. C’est incongru et incompréhensible que vous jeunes, vous veniez parler de peine de mort alors que le parti lui-même s’est battu avec les autres partis de l’opposition et de la majorité et les OSC, pour que l’on supprime la peine de mort au Burkina.  Deuxième point, la situation sécuritaire était tellement difficile qu’il fallait, pour eux, demander la démission immédiate du président Roch Marc Christian Kaboré. Nous avons discuté avec les jeunes et nous leur avons dit qu’ils pouvaient demander la démission du président mais d’une certaine manière, en  lui demandant de tirer les conséquences de son propre échec. Nous avons donc amendé la déclaration. Ils ont donné leur accord et nous leur avons permis d’aller tenir leur conférence de presse. Sur place, deux éléments, en l’occurrence Adama Tiendrebéogo et Abdoul Karim Bagagnan dit Lota, ont dit qu’ils n’allaient plus lire le document amendé par le président Komboïgo et par le secrétariat permanent. Ils ont dit avoir une autre déclaration à faire. Ils avaient un manuscrit dans lequel était mentionnée la peine de mort et c’est ce qu’ils voulaient lire. Il y a deux autres camarades qui leur ont dit que la direction oriente la politique ; ils ne peuvent donc pas organiser une conférence de presse pour parler de ce que la direction n’a pas agréé. Mais ils ont insisté. Et comme tous avaient le document, quand les autres ont observé qu’ils n’allaient pas dans le sens voulu, ils ont arraché le papier. Et la conférence s’est terminée en queue de poisson. Nous avons demandé à la commission de contrôle et vérification de les entendre et ils ont été entendus. L’affaire a été portée au niveau du BEN qui ne peut donner que des sanctions d’avertissement. Nous sommes donc partis pour donner ces sanctions et les mêmes jeunes qui ont désobéi, ont mobilisé des badauds qui sont venus lapider les membres du Bureau exécutif national et blessr des CRS venus assurer l’ordre au siège du parti. Le BEN ayant estimé que les lignes rouges ont été franchies, a décidé de les avertir tous et a décidé de proposer au BPN, de suspendre les trois tenus pour responsables des violences.  Et nous avons convoqué le BPN. Les mêmes vice-présidents ont demandé de reporter la date du BPN pour que les esprits s’apaisent. Nous avons accepté cela et nous avons convoqué le BPN pour le 23 octobre 2021. Ils ont tout fait pour que ce BPN ne se tienne pas mais nous l’avons tenu. C’est là que nous avons vu une lettre apportée dans la salle par le camarade Topan Mohamed pour demander de ne pas sanctionner les trois jeunes qui ont organisé la violence au siège. Une lettre, soi-disant venant du président Blaise Compaoré, que nous avons lue in extenso et nous avons demandé aux membres du BPN de s’exprimer là-dessus.  Le BPN a dit qu’il prenait acte de cette lettre mais qu’il allait sanctionner les trois militants. Nous avons voté. C’est une seule personne (le vice-président Mohamed Topan, ndlr) qui a voté contre. Car, c’est elle qui a envoyé la lettre. Il n’y avait pas d’abstention. Les autres membres du BPN ont voté pour la sanction. Mais nous savions que les jeunes étaient instrumentalisés. C’était juste le sommet de l’iceberg car ça bouillonnait en bas. Mais on les suivait et tout allait se révéler plus tard. Et ce BPN-là, compte tenu des retards, a dû dire qu’on ne peut plus convoquer le congrès en novembre. Les dates des 4 et 5 décembre ont été arrêtées. Voilà comment le congrès a été convoqué régulièrement.

 

 

« Vous me demandez de reporter le congrès ; mais ce n’est pas Eddie Komboïgo en qualité de président, qui a convoqué ce congrès »

 

Vous dites que le CDP se porte très bien mais à l’analyse de vos propos, il est clair que beaucoup de choses ne vont pas au CDP ! Nous parlons notamment des frondeurs !

 

7 ou 8 personnes sur un BPN de 600 membres et un congrès a minima de 1300, vous voyez que ce n’est pas significatif. Même si ce sont des vice-présidents, ce sont des vice-présidents nommés par Eddie Komboïgo et acceptés par le congrès de 2018. Chaque élément frondeur n’a qu’une voix au sein des organes et des instances. C’est pourquoi je vous dis que ce n’est pas significatif pour nous.

 

« J’ai toujours respecté le président Compaoré. Je le respecte »

 

Que pensez-vous de l’action de vos vice-présidents ?

 

Vous devriez chercher à comprendre pourquoi le congrès n’a pas eu lieu les 4 et 5 décembre. Après avoir convoqué le congrès et mis un comité d’organisation en place qui était dirigé par le vice-président Achille Tapsoba, nous avons fait tout le travail au niveau des sous-commissions jusqu’au point où nous nous sommes réunis en séminaire du BEN pour faire la synthèse des documents. Ce sont les documents que le BEN propose au BPN avant d’aller au congrès. Pour des raisons de discrétion, parce que nous connaissons maintenant les réseaux sociaux, nous avons voulu faire un exposé en vidéoprojecteur. Il y en a qui ont estimé qu’ils venaient de découvrir les documents et qu’il fallait leur laisser le temps de regarder. Sur les deux points d’achoppement, il y avait la prospective de changer la dénomination et le logo du parti. Le second point, c’est la proposition de réduire les attributions du président d’honneur. Les frondeurs étaient dans les commissions et ils ont travaillé avec les autres sur ces questions. Mais d’où viennent ces propositions ? En septembre 2020, nous étions de passage en Côte d’Ivoire et le président d’honneur a posé la question suivante : est-ce que vous pensez vraiment qu’avec le nom CDP, vous pouvez gagner les élections ?  Parce que le CDP a certes des actifs, mais également un passif lourd dont vous n’êtes pas comptables. Et de dire : peut-être qu’en faisant évoluer le nom ou la dénomination, on saura que vous n’êtes pas comptables de ce passif-là. Nous avions dit au président Compaoré, à l’époque, que nous n’étions pas venus discuter de cela mais de la campagne ; mais après la campagne, certainement, le temps de la réflexion viendra. Le moment étant venu, nous avons fait des conférences provinciales dans les 45 provinces et nous avons requis les propositions des militants à la base des différentes sections.  Et c’est cette synthèse que le Comité d’organisation a faite pour soumettre au Bureau exécutif national. On dit que, dans la prospective, il faut voir si on peut changer la dénomination et/ou le logo. Donc, ce n’est pas quelque chose d’immédiat. Et au regard des multiples lettres du président d’honneur qui viennent semer la confusion et la discorde, il faut peut-être réduire ses attributions ou le laisser comme président d’honneur. Au BEN, il y en a qui ont estimé que nous ne pouvions pas le faire sans aller le voir au préalable. Nous avons donné notre accord en disant que nous-mêmes, nous devions nous y rendre le dimanche 21 novembre et revenir le mardi 23. Nous avions pris le billet et nous leur avons donné cette information. Mais il était bon de discuter sur les synthèses. Comme certains ont demandé d’accorder du temps pour regarder les documents, nous avons arrêté le mercredi suivant pour qu’on puisse reprendre les travaux du séminaire. Dans la soirée du 20 novembre, aux alentours de 21h, nous voyons encore un document circuler dans les réseaux sociaux pour dire qu’il faut reporter le congrès des 4 et 5 décembre et de ce fait, qu’il n’est plus nécessaire que je fasse le déplacement. Les raisons qui ont été invoquées dans ladite lettre, c’était qu’il y a eu les attaques d’Inata et que nous devons rester solidaires du peuple burkinabè. Et qu’en plus, organiser un séminaire dans cette période, on n’est pas sûr que les militants des 45 provinces seront présents. Nous avons répondu que nous sommes au Burkina Faso, nous connaissons notre base (les militants) et qu’elle sera là. Maintenant, parlant de solidarité avec le peuple burkinabè, nous avons observé le deuil national décrété par le président du Faso. Le CDP a fait une déclaration de condamnation et de compassion aux victimes de l’attaque d’Inata. Le CFOP que je suis, a fait également une déclaration. Nous ne pouvons pas être plus royalistes que le roi parce que c’est le gouvernement qui dirige et le gouvernement, ce n’est pas le CDP. Mais comme le président Compaoré a demandé de reporter, nous avons dit que nous allions soumettre la lettre à la 71e session du BPN qui devait se tenir le 3 décembre puisque ce n’est pas Eddie Komboïgo qui a convoqué le congrès. C’est la 70e session du BPN qui a convoqué, le 23 octobre, le congrès. Et le mercredi qui suivait, effectivement, le séminaire s’est réuni. Les mêmes frondeurs sont venus dire que compte tenu de la lettre du président Compaoré qui demande de reporter le congrès, eux ne sont plus prêts à analyser la synthèse des documents qui devraient être amendés pour être soumis au BPN. Nous leur avons dit que même si c’est une lettre du président Compaoré, il demande un report, pas une annulation. Nous leur avons demandé d’accepter d’amender les documents et le jour où on va convenir de la date du congrès, ce sont les mêmes documents qui seront soumis au BPN. Chacun a pris la parole et comme vous savez, dans nos organes et instances, c’est le consensus et en l’absence de consensus, on passe aux votes. Et là, au moment où on devait voter, sachant qu’ils n’ont pas la majorité, ils ont ramassé leurs documents et ils sont sortis de la salle. La majorité restée, a amendé les documents. Et le 30 novembre, nous avons reçu encore une lettre nous demandant d’arrêter de préparer le congrès. Le 2 décembre, nous avons encore reçu une lettre dans laquelle on dit qu’on a été saisi par des camarades qui disent de reporter le congrès. J’ai répondu à tous. Vous me demandez de reporter le congrès ; mais ce n’est pas Eddie Komboïgo, en qualité de président, qui a convoqué ce congrès. Toutes vos lettres seront soumises à la 71e session du BPN. Si le BPN décide de reporter le congrès, il sera reporté. Si le BPN refuse, nous tiendrons le congrès parce que d’abord, les lettres du président Compaoré ne remettent pas en cause les décisions des organes du parti. Elles viennent en complément. Dans ses lettres, c’est « je vous demande », « je vous suggère », « je vous sollicite » mais l’organe de décision, c’est bel et bien statutairement, le Bureau politique national. Le BPN a été convoqué pour le 3 décembre et dans la matinée de cette date, nous recevons une assignation à 8h30 pour comparaitre à 10h. Nous sommes allés et nous n’avions pas toutes les pièces avec nous. Le dossier a été jugé et le juge des référés a ordonné de suspendre le congrès. Nous nous sommes posé des questions sur la substance de l’ordonnance. Pourquoi les avocats des requérants ont-ils demandé une suspension et non un report ? Nous avons trouvé que c’était quand même abusif et nous avons fait appel à jour fixe. L’appel a été jugé le 9 décembre et le premier président de la Cour d’appel a annulé l’ordonnance du juge des référés et donné droit au CDP et à son président de poursuivre les préparatifs du congrès. Les dates des 4 et 5 étant dépassées, il ne nous restait que les dates des 11 et 12, des 18 et 19 décembre. Par ailleurs, les lettres du président Compaoré nous suggéraient de nous rapprocher du ministère de l’Administration territoriale pour savoir quels risques nous encourions si nous n’arrivions pas à tenir le congrès. Nous avons écrit au ministère de l’Administration territoriale. En réponse, le MATD a rappelé que nous devrions tenir le congrès en mai 2021 et que nous sommes dans la période de grâce  pour que les organes sortants convoquent le Congrès.  Que cette période de grâce qui nous est accordée, ne saurait dépasser le 31 décembre 2021. Au vu de tout cela, à partir du 10 décembre et sur la base de l’arrêt de la Cour d’appel, il ne nous restait que les dates des 18 et 19 parce que les dates qui suivaient, c’était Noël et après cela, on tombait en 2022. Alors, les dates des 18 et 19 décembre ont été retenues pour le congrès, et le 1er décembre pour reprendre les travaux de la 71ème session du BPN. A l’approche du congrès, le jeudi 16 décembre, les mêmes frondeurs nous font une assignation à comparaitre le 17 décembre pour voir suspendre encore ce congrès. Nous sommes allés devant le juge des référés et cette fois-ci, avec toutes nos pièces. Nous avons argumenté d’abord sur deux éléments essentiels. Un, la force et l’autorité de la chose jugée, (jugée en première instance et jugée en dernier ressort en Appel). Donc, on ne peut plus faire recours aux mêmes instances judiciaires pour trancher de la même question querellée. Secundo, nous avons mis dans nos statuts, en substance, « que nul ne peut faire recours à des voies externes pour régler des problèmes politiques dans le parti s’il n’a préalablement épuisé les voies de recours en interne dûment constatées par le Bureau politique national (BPN). » Notez bien : « dûment constaté par le Bureau politique national ». Cela voudrait dire que le BPN doit se réunir, constater que les voies de recours internes ont été épuisées et établir une pièce. Nous avons donc demandé aux requérants de nous montrer la pièce. Le juge nous a entendus de 11h jusqu’à 15h30mn et a vidé le dossier aux alentours de 18h30, en disant que le dossier des requérants était irrecevable. Et que de ce fait, nous pouvions poursuivre nos travaux en lien avec le Congrès. Pendant ce temps, les membres du BPN qui avaient été convoqués à 17h, attendaient toujours dans la salle de réunion. Quand nous sommes arrivés avec la victoire, c’était la vraie joie et à peine s’ils ne m’ont pas porté en triomphe. Nous avons lu le verdict et notre avocat est venu nous l’expliquer. Les congressistes qui avaient tous entendu lire toutes les lettres qu’on attribue au président Compaoré, ont décidé d’en prendre acte et de tenir le Congrès les 18 et 19 décembre 2021. Les membres du BPN ont donc connu le document de synthèse analysé par le BEN (Bureau exécutif national) et l’ont amendé. Ce sont donc ces documents qui ont été reversés au Congrès par le BPN.

 

On a l’impression que le président d’honneur du CDP, Blaise Compaoré, dans sa façon de communiquer, ne vous transmet pas directement des documents mais passe par des personnes interposées. Qu’est-ce qui explique cela ?

 

C’est dommage ! C’est ce que les uns et les autres disent. Je sais comment le président d’honneur communique. Avant de m’envoyer une lettre, il m’appelle. Il me parle et ensuite, je reçois la lettre. Mais cette fois-ci, je n’ai pas reçu de lettre de sa part. Quand vous regardez, après la première lettre où il s’est opposé à la sanction (ndlr, la sanction de Bagagnan Karim dit Lota et Issa Tiendrebeogo dit Colonel), on m’envoie une autre lettre au contenu gentil pour me dire d’envoyer le budget du Congrès pour qu’il puisse financer. On s’empresse de la publier sur les réseaux sociaux.  Ecoutez, croyez-vous que c’est de cette façon qu’on procède pour financer un parti politique ? Où a-t-on vu cela ? Nous nous sommes demandé si ceux qui élaborent ces lettres-là, veulent créer des problèmes au président Compaoré. Car, le président d’honneur est actuellement, un hôte en Côte d’Ivoire. Le président Ouattara l’a accueilli. Comment la majorité va-t-elle accueillir le fait qu’il soit là-bas (en Côte d’Ivoire, ndlr) et continuer à financer un parti ? On s’est posé beaucoup de questions. Mais enfin, je pense que les choses ne se passent pas comme cela (…).

 

Finalement, est-ce que les lettres sont authentiques ?

 

Nous avons toutes les lettres et nous avons déjà animé une conférence de presse et votre journal y était  (Le Pays, ndlr). A l’occasion, nous avons sorti toutes les lettres et vous avez vu les signatures. L’évolution des signatures fait que nous restons dans le doute. Mais en tout état de cause, nous avons supposé que les lettres étaient de lui (Blaise Compaoré, ndlr) puisque les vice-présidents insistent. Et nous avons lu les lettres à la 71e session du BPN. Les membres du BPN en ont pris acte et ont décidé de tenir le Congrès.

 

Vous étiez le seul en lice pour être le président du CDP et pour la troisième fois. Votre parti est habitué aux grands congrès. Cette fois-ci, on constate un congrès a minima. Est-ce que vous êtes déçu de la façon que votre congrès a été tenu ?

 

Non ! Pas du tout ! C’est à la 70e session du BPN qu’il a été décidé de convoquer le congrès et de le tenir a minima. C’est une proposition du Bureau exécutif national (BEN), compte tenu de la situation sécuritaire. Vous me connaissez. Si je voulais organiser un congrès avec 5000 ou 10 000 militants, dans un stade, je le remplirais car les militants du CDP sont là. Mais  compte tenu donc de la situation sécuritaire, nous avons suivi ce que l’organe de décision (le BPN) avait recommandé.

 

Comment qualifiiez-vous aujourd’hui, vos rapports avec l’ex-président Blaise Compaoré ?

 

J’ai toujours respecté le président Compaoré. Je le respecte. Je prie que Dieu ne me donne pas un cœur qui me poussera à ne pas le respecter. Je le respecterai pour toujours à cause de ce qu’il a été pour le Burkina. D’ailleurs, je ne crois pas avoir un ennemi. Même s’il y a des incompréhensions avec certaines personnes, j’évite que cela ne se transforme en inimitié. Nous sommes dans un parti, nous avons des protagonistes. Ce ne sont même pas des adversaires. C’est le parti de la majorité qui est notre adversaire. Mais ils ne sont pas nos ennemis… encore moins nos propres camarades qui sont nos protagonistes.

 

Ne pensez-vous pas que des gens veulent vous opposer au président d’honneur ?

 

Il ne faut pas écarter cette analyse. Car, à l’approche du congrès, il y a des ambitions qui naissent puisqu’on doit renouveler les organes. Il y en a qui ont envie d’être vice-présidents et d’autres, président. Mais cela doit se passer dans les instances et organes du parti, par consensus ou par vote. Certainement que ceux qui ont usé de ces lettres, ont voulu discréditer Eddie Komboïgo en disant qu’ « Il n’est pas l’homme qu’il faut aujourd’hui ». C’est curieux parce que ce sont ces mêmes personnes qui ont sillonné les 45 provinces en 2020 pour me présenter à l’Eglise catholique, à l’Eglise évangélique, à la Communauté musulmane, à la Chefferie coutumière et à l’ensemble des militants en disant : «  Voici l’homme providentiel pour être candidat au nom du CDP et remporter des victoires ». Nous sommes une année après cela. Et maintenant, ce sont les mêmes personnes qui disent qu’il y a une mal gouvernance. Je leur pose la question : «  La mal gouvernance se trouve où ? » D’autant plus qu’en trois ans, nous avons tenu 57 réunions du secrétariat permanent, 45 sessions du BEN, 14 sessions du BPN et 2 congrès extraordinaires. Je n’ai pas vu, au Burkina Faso, un seul parti qui a eu autant de réunions que nous. Tout ceci, afin de nous parler. Mais si vous n’avez pas une majorité au sein des organes et des instances et vous pensez passer par la courte échelle, ça ne marchera pas. Il aurait fallu venir convaincre les membres du BEN, les membres du BPN et les congressistes. Comme ils se disent qu’ils ont une position minoritaire, il faut chercher la courte échelle en cherchant à me discréditer avec des jeunes qui ont tout dit : «  Il est mal inspiré. Il gouverne le parti comme une société ». C’est où ? Dites-le nous.

 

On vous a reproché le fait d’être allé au monument de Thomas Sankara. !

 

Est-ce que ça, ce sont des arguments valables? Nous sommes des Africains. Même si c’est votre ennemi, devant la mort, il faut s’incliner. Ce n’est pas Eddie Komboïgo qui a fait de Thomas Sankara un héros national. C’est la même personne que nous citons, le président Blaise Compaoré. C’est encore lui qui a fait  ériger un monument à Ouaga 2000 pour honorer nos héros. En tant que Chef de file de l’opposition (CFOP), président d’institution, j’ai été invité. J’y suis allé. Notez-le : «  Si on avait invité Eddie Komboïgo en tant que Burkinabè, je serais allé. En tant qu’expert-comptable, je serais allé.  En tant que président du CDP, je serais allé ». Et comme on m’a invité en tant que CFOP, je suis allé. Il n’y a pas de doute là-dessus. Mes convictions sont personnelles et sont les résultantes de mon éducation.

 

« Il y a des gens qui sont assis à Abidjan là-bas et qui emploient des méthodes de courte échelle pour évincer Eddie Komboïgo. C’est peine perdue »

 

L’un de vos soutiens, en tout cas jusqu’à une certaine date, Achille Tapsoba, vous a tourné le dos au dernier moment. Que s’est-il  passé ?

 

Moi-même, je vous pose la question puisqu’il était le président du comité d’organisation du congrès. Je pense que (silence), il faut lui poser la question. Mais il m’a dit : «  Président Komboïgo, je souhaiterais que vous alliez à Abidjan avant de venir tenir le congrès  ». Je lui ai dit que le temps ne permettait plus d’aller à Abidjan. Il était déjà allé en Côte d’Ivoire et a souhaité que je le fasse aussi. Il m’a dit qu’il a été invité en Côte d’Ivoire. Il m’a donc suggéré d’y aller. J’ai dit non. Moi, j’avais pris mon billet et son billet et celui du trésorier pour aller clarifier les multiples lettres qui sont attribuées au président d’honneur et ventilées sur les réseaux sociaux. J’avais annoncé au séminaire du BEN, que j’irais le lendemain. Après, j’ai lu une lettre qui me demande de surseoir au voyage. Si je n’ai pas d’invitation, je n’irai pas.

 

Il se dit que vous avez tourné le dos à Blaise Compaoré parce qu’il ne vous aurait pas soutenu financièrement pendant la campagne électorale des dernières élections. Qu’en dites-vous ?

 

Est-ce que cela est écrit quelque part dans les statuts et règlements intérieurs ?

C’est ce qu’affirment bien des Burkinabè…

 Je ne pense pas que ce soit l’argument qui ait été soulevé par les membres du BPN et du congrès, même s’ils auraient souhaité avoir un appui. Nous avons donné un certain nombre d’attributions au président d’honneur par une résolution. Mais moi-même, les membres du BPN et les congressistes, avons le fort sentiment que compte tenu de l’état de santé du président Compaoré, certaines personnes qui l’entourent, abusent de lui pour semer la zizanie dans le parti. Et donc, le BPN s’est assumé en proposant aux congressistes de retirer ses attributions mais de le laisser comme tel, à savoir comme président d’honneur. Les congressistes en ont pris la décision.

 

Avez-vous le sentiment que des gens vont à Abidjan pour prendre des consignes et des orientations pour venir vous les imposer ?

 

Je n’ai pas ce sentiment. J’en ai la certitude.

 

Pouvez-vous partager cette certitude avec nous ?

 

Simplement, à l’approche du congrès et avant qu’on ne se réunisse en séminaire, un certain nombre de membres du BEN ont été invités en Côte d’Ivoire. Ils y sont allés et ils sont revenus nous dire qu’ils ont eu des réunions avec Salif Kaboré et Emile Kaboré. Ils ont dit des choses que je n’ose pas dire ici.

 

Et pourtant, c’est entre nous ?

 

Non ! (Rires). Ce n’est pas eux tous.  Car, certains d’entre eux ont eu des comportements maladroits et ce sont ceux-là mêmes qui sont aujourd’hui les frondeurs. Mais il y en a qui sont venus se confesser.

 

Comment peut-on inviter des membres du BEN à Abidjan sans vous aviser au préalable, vous, président du parti ?

 

C’est ce que le président (Eddie Komboïgo, ndlr) se pose comme question. C’est la même question que les 600 membres du BPN se sont posée. C’est la même question que les congressistes se sont posée. Ce n’est pas la méthode de l’homme (Blaise Compaoré, ndlr). Je vous ai dit comment il procède. Il y a des gens qui sont assis à Abidjan là-bas et qui emploient des méthodes de courte échelle pour évincer Eddie Komboïgo. C’est peine perdue. Et les congressistes l’ont bien démontré les 18 et 19 décembre derniers.

 

Quel sort réservez-vous aujourd’hui aux frondeurs ?

 

Nous avons dit que nos portes étaient ouvertes, même s’ils ont été sanctionnés. Mais s’ils reconnaissent leurs erreurs et qu’ils reviennent, nous allons les recevoir et aviser. Dans nos statuts et règlement intérieur, il y a des procédures pour arriver à nous entendre et à repartir du bon pied. Je ne suis pas rancunier, bien au contraire ; je souhaite que les bases et le sommet du CDP soient élargis. Mais à condition que les voies statutaires et règlementaires soient suivies.

 

Après les élections, il y a beaucoup de démissions que vous avez enregistrées au CDP, parmi lesquelles on peut citer celles de Luc Adolphe Tiao et Jérôme Bougouma. Est-ce que ces départs n’affectent pas le parti ?

 

Certainement que tout départ peut affaiblir mais il faut aussi regarder combien de gens viennent et reviennent au CDP sans tapage et dans l’anonymat.

 

N’est-ce pas là une réponse politique ?

 

Non ! Ce n’est pas une réponse politique. J’ai toujours un pincement au cœur quand je vois un militant s’en aller. Mais ils ont également fait leur temps, il faut le dire. A ce que je sache, les deux départs que vous avez cités, personne ne m’a reproché quoi que ce soit. Mais je me pose des questions. Ce n’est pas facile d’être dans l’opposition. C’est très difficile de rester dans l’opposition pendant des années. Le CDP a passé au moins 18 ans au pouvoir, depuis 1996 à 2014. Le CDP est né au pouvoir. Il y a des gens qui sont venus dans la majorité CDP et sont ressortis pour aller dans la majorité MPP. Leur demander de vivre 10 ans dans d’opposition, peut paraitre très difficile. Où est-ce qu’ils sont allés ? Sont-ils restés dans l’opposition ou bien sont-ils partis à la majorité ? Les réponses à ces questions, vous amèneront à comprendre les raisons de leur départ. Ceux qui quittent le CDP ne vont pas à l’opposition !

 

Lors de votre récente sortie médiatique, vous dites vouloir incarner le CDP futuriste. Est-ce que le CDP aujourd’hui, a mal à ses anciens ?

 

Non ! Je pense que c’est une boutade que j’ai jetée puisqu’ils se disent de l’aile historique du parti. La rhétorique a fait que j’ai dit que nous sommes le CDP futuriste. Même les anciens peuvent être des futuristes. Il y a des anciens avec nous et qui aident à regarder et à construire le futur à partir de nos acquis et de nos erreurs. On a donc besoin de l’histoire du CDP pour avancer. Mais refuser de lire l’histoire et de tourner la page, je pense que c’est se tirer une balle dans le pied. Nous allons toujours travailler pour qu’il y ait du progrès car, dans le sigle CDP, il faut qu’on progresse, qu’on avance.

 

Comment comptez-vous conquérir le pouvoir d’Etat après tout ce qui s’est passé ?

 

Vous doutez que le CDP revienne au pouvoir ?

 

Après les élections, nous avons vu vos résultats…

 

Vous avez vu les résultats de ces élections. Je ne souhaite pas revenir là-dessus parce que nous avons transcendé les choses pour que le pays ne brûle pas. Tout le monde connait la vérité et on avance. Le CDP est la première force politique du Burkina. Mais officiellement, le CDP est devenu la seconde force politique. Nous acceptons et nous continuons. Nous prendrons des dispositions dans les années à venir pour montrer que le CDP est la première force et cette fois-ci, on empêchera les fraudes massives.

 

Vous dites avoir été choisi comme l’homme providentiel avant les élections de novembre 2020. Pensez-vous être aujourd’hui l’homme providentiel malgré les résultats d’après-élections ?

 

Ce qui est certain, le Bureau politique national a voté pour moi à l’unanimité et les congressistes ont entériné à l’unanimité.

 

Vous étiez seul candidat en lice

 

Le BPN a voté pour moi à l’unanimité. Et au congrès, il n’y a pas eu une seule abstention. L’ensemble des congressistes a entériné. Seul en lice ou pas, s’il y avait d’autres personnes, elles se seraient présentées. C’est ce qui me rend plus fort mentalement et qui m’engage à m’investir davantage pour que le CDP reste fort et conquérant.

 

Après ce congrès, quel est l’agenda du CDP ?

 

Après un congrès ordinaire, le travail commence. Nous élaborons avec le BEN,  un projet de programme politique qui va être adopté après amendements par le BPN. Nous devons occuper l’espace politique, élargir nos bases, former nos militants et faire en sorte que le CDP soit l’alternative face à l’incapacité de la majorité en place. C’est tout un travail que nous voulons commencer. Cette fois-ci, nous avons 4 ans (avant 2025, ndlr). Si on s’y prend tôt, il n’y a pas de raison que nous ne parvenions pas à atteindre nos objectifs.

 

D’aucuns disent que Eddie Komboïgo aurait dû rester dans les affaires plutôt que de faire la politique où il subit des coups (vous en donnez aussi certainement) et se ruine financièrement. Que leur répondez-vous ?

 

Vous savez, dans la vie, on dit souvent que seuls les imbéciles ne changent pas. Même ceux qui sont dans les affaires ont changé d’activités ou ont élargi leurs activités. Et c’est cela qui justifie leur réussite. J’ai pensé qu’à un moment donné, je pouvais m’investir en politique, et en front office. J’y suis. Mes sociétés continuent de fonctionner. C’est vrai que financièrement, c’est lourd. Mais tant que j’ai le minimum pour m’occuper de ma famille, aider des Burkinabè, je continuerai de le faire jusqu’à ce que je blanchisse (vieux).

 

Est-ce que vos activités politiques n’ont pas négativement impacté vos affaires ?

 

Certainement ! Le simple fait qu’on dise que c’est la société d’un président de parti d’opposition, certains ont peut-être peur de vous donner un marché. Mais on se bat toujours, c’est vrai. Les banquiers nous appellent PPE (Personnes politiquement exposées). Ce n’est donc pas facile d’avoir leur accompagnement.

 

Avez-vous toujours des marchés publics ?

 

Nous ne travaillons pas souvent avec l’Etat. Depuis les années 2010, nous avons orienté nos activités vers le privé. Ce qui fait que nous pouvons encore survivre.  Mais c’est à tort qu’on refuse de nous donner des marchés publics.

 

On refuse de vous donner des marchés publics ?

 

Notre position d’opposant n’est pas des moindres. Cela fait peur à certaines personnes. Et même quand un marché devait nous revenir de droit, on use de moyens pour ne pas nous l’accorder. Je peux vous dire également que même mes maisons qui avaient été louées par certaines personnes, on les a poussées à déménager (rires).

 

Bien des personnes estiment que vous êtes proche du chef de l’Etat, Roch Kaboré. Est-ce vrai ?

 

Moi, je suis proche de tout le monde.

 

Avec Roch Kaboré, c’est tout autre car on pense que vous êtes l’un de ses fidèles lieutenants…

 

Ah bon (rire) ! Je serais alors au Mouvement du peuple pour le progrès. 

 

Pas forcément (rires)…

 

Non ! Il faut être humain. Le président Roch Marc Christian Kaboré est un président d’institution. Il est président du Faso et je suis le Chef de file de l’opposition. Il arrive qu’il me consulte sur certains sujets. Quand je ne suis pas d’accord, je le lui dis. Vous avez vu le dossier Sao Naaba dont on a parlé. Nous ne sommes pas des ennemis. Nous souhaitons tous que le Burkina avance. On élève souvent le ton pour que le président du Faso fasse bouger les choses comme ce qui s’est passé au CFOP. C’est parce que nous voulons la paix. Si les choses se passaient normalement, il serait plus à l’aise. Mais ceux qui disent que je suis un ami de Roch Kaboré, peut-être qu’ils le sont plus que moi (rires).

 

Quel est actuellement l’état de vos rapports avec le président du Faso ?

 

 Je le respecte en tant que président d’institution. Je n’ai pas d’autres rapports. C’est dans ce cadre également, que je suis allé à Tuiré (le village de Roch Kaboré, président du Faso, ndlr) lors des funérailles de son père. Je trouve cela humain. Je suis allé prier à l’église pour le repos de l’âme de son père. Je suis allé sur la tombe de son père pour  les bénédictions chrétiennes. Je suis allé le saluer et je suis reparti. Il y a un certain nombre de députés issus de la majorité et de l’opposition, qui ont également accompagné le président du Parlement, Alassane Bala Sakandé, à ces funérailles-là. Je trouve cela bien et c’est républicain.

 

Certains de vos détracteurs vous trouvent suffisant et arrogant. Votre réaction ?

 

(Rires). Et selon vous ?

 

(Rires). C’est nous qui posons les questions…

 

Je pense que ceux qui me trouvent suffisant et arrogant se trompent. La suffisance procède de quoi ? On dit ah tiens, il a suffisamment de moyens. Donc, il ne vient pas nous en demander. On me trouve donc suffisant. Vous voulez que chaque Burkinabè se lève le matin pour venir vous dire : «  Donnez-moi ceci, donnez-moi cela ? ». Je me suis battu durant 25 ans de ma vie pour me construire. Etre arrogant, je ne pense pas. Avoir le courage de dire la vérité quand je ne suis pas d’accord, ou quand j’ai une conviction ? Est-ce de l’arrogance ? Non, pas du tout ! J’ai dit aux vice- présidents, de ne pas déifier le président Compaoré. Si vous le faites, c’est que vous n’avez pas tiré leçon des évènements des 30 et 31 octobre 2014. 

 

En le disant, que pensiez-vous ?

 

On dit qu’on ne doit pas discuter des paroles du président Compaoré car c’est voix d’évangile. Je leur dis simplement que moi, je ne reconnais qu’un seul Dieu. Le Dieu d’Abraham. Le président Compaoré est un humain. Quand vous dites certaines vérités à des gens, ils disent : «  Il veut cogner sa tête avec celle du président Compaoré ». Ou bien quand je dis au président Roch Marc Christian Kaboré, que je ne suis pas d’accord qu’on désigne le Sao Naaba comme président de la CENI (Commission électorale nationale indépendante) parce qu’il est militant du MPP, on dit que je défie la chefferie coutumière. On dit que je défie le président du Faso. Moi, je les aime. Je suis moaga et issu d’une famille de chefferie coutumière. Je respecterai toujours la chefferie coutumière. Et je respecterai le président Kaboré. S’il a des incapacités de gouvernance, je sortirai et je m’exprimerai. Si c’est cela qui vaut qu’on dise que je suis arrogant, qu’il en soit ainsi.

 

Quels sont vos vœux pour l’année 2022 qui démarrera bientôt ?

 

En cette fin d’année, c’est de prier Dieu pour que la paix revienne au Burkina Faso. Sans la paix, on ne peut absolument rien construire. Sans la paix, c’est difficile de réaliser la cohésion nationale. C’est difficile aujourd’hui, parce que ce sont nos propres frères qui sont nos propres assaillants dans une guerre dite de terrorisme sans fondement religieux et sans fondement ethnique. Cela ne peut être qu’une guerre de prédation d’autant plus que les zones querellées sont des zones hyper-riches. Que Dieu ouvre l’intelligence des gouvernants afin qu’ils utilisent la voie de la diplomatie intelligente, c’est-à-dire la négociation avec ceux qui pensent nous chasser de ce territoire. Il faut qu’ils s’asseyent autour d’une table pour échanger et trouver une solution. Je prie Dieu Tout-puissant pour que les malades soient rétablis et que les pandémies s’éloignent de nos pays. Je prie Dieu pour mon peuple, je prie Dieu pour que la cohésion revienne au CDP et que l’on soit un parti fort afin de donner de l’espoir au peuple burkinabè en vue de bénéficier de sa confiance. Je prie pour que les partis de l’opposition aient la force. Je prie également pour les partis de la majorité, afin que Dieu les éclaire pour qu’ils sachent qu’ils ne sont pas la solution et qu’ils nous rejoignent dans l’opposition afin de construire une opposition plus forte, plus conquérante et qui donne l’espoir d’une alternance crédible.

 

Propos recueillis par Michel NANA et Boureima KINDO

 

 


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