HomeEchos des provincesKORSIMORO : L’installation des Koglwéogo continue

KORSIMORO : L’installation des Koglwéogo continue


« Il faut apprendre à consommer le poisson car la viande va manquer ; il y aura des animaux mais moins  de viande, car les vols sont finis ». C’est en ces termes que les règles des Koglwéogo ont été expliquées aux habitants de Sabouri, localité située à 12 km de Korsimoro, dans le Sanmatenga. Trois autres villages se sont associés à Sabouri pour l’installation de leur comité d’auto-défense Koglwéogo. C’était le 18 mai 2016, de 11h à 17h. Etaient présents à la cérémonie, le chef Koglwéogo de Mané qui est en même temps chef du Centre-Nord, Ouédraogo Youssouf dit Wintoog-Longo, le chef Koglwéogo de Korsimoro et celui de Wouga. Les nouveaux membres ont été invités à adopter un comportement digne et responsable, gage d’un comité Koglwéogo en phase avec les règles des plus hautes autorités du pays.

 

“Tar wend panga”, voici le nom de baptême du tout nouveau comité d’auto-défense Koglwéogo de Sabouri, localité située à 12 km de Korsimoro, dans le Sanmatenga. Trois autres villages environnants ont aussi participé à la cérémonie, et leur comité est intégré d’office à celui de Sabouri. Il s’agit au total de  quatre villages, et chaque village compte 12 membres donc 48 personnes. La particularité ici, c’est la présence de deux femmes dans chaque équipe. Les responsables Koglwéogo de Mané, Korsimoro et de Wouga étaient présents. Une foule enthousiaste était présente sous le grand caïlcédra du village, à une centaine de mètres du CSPS. La satisfaction se lisait sur les visages. « Nous sommes sauvés», lance un inconnu dans la foule. Tour à tour, les responsables prennent la parole pour exprimer leur adhésion à ce comité Koglwéogo. Wintoog-longo est le nom de ce célèbre chef Koglwéogo de Mané et qui représente les Koglwéogo du Centre-Nord. Il a pris la parole en ces termes : « Mon surnom “wintoog-longo”, en langue nationale mooré, veut dire que je suis un trou en plein jour ; lorsque vous tombez dedans, il n’y a pas d’excuse parce que le trou est visible. Je demande à Dieu de vous aider à ne pas tomber dans ce trou, mais certains sont déjà dans le trou car je voyais des voleurs dans la foule, mais ils sont déjà partis. Je veux que vous évitiez de porter le cache-sexe car c’est un malheur ; il faut qu’on évite aussi d’être attaché avec des cordes. Je donne raison aux hommes de loi parce que s’ils nous donnent la liberté de faire, il y aura trop d’abus. Nous aussi, nous aidons les Forces de l’ordre car nous envoyons nos voleurs là-bas. Que les chefs de village ne cherchent pas à monopoliser le comité et à en prendre la direction. Lorsqu’il y aura un problème, nous allons venir régler. Si dans le village il y a un voleur invincible, appelez-nous et nous allons venir le prendre. Tout le monde est passible de subir les sanctions, femme comme homme. Nous ne faisons pas de discrimination. Nous ne réglons pas les problèmes fonciers, de champs, d’adultère ou de femme. Nous parlons seulement des voleurs. Dans les sanctions, il y a le port du cache-sexe et l’animal volé sur la tête, ou bien on te fait porter l’objet volé pour faire le tour du marché. Sachez aussi, habitants de Sabouri et environs, que nous faisons table rase du passé ; la loi Koglwéogo n’est pas rétroactive, tout commence à partir de cet instant même où nous sommes en train de vous installer. Le Koglwéogo n’a pas de parent, de chef, d’amis, de femmes, d’enfants ou de vieux, tous sont passibles de sanction s’ils sont pris la main dans le sac. Il n’y a pas de suppositions dans nos règles. C’est seulement le flagrant délit».

 

Les règles ont été présentées à l’assistance, les quatre chefs de village présents ont tour à tour pris la parole pour dire oui publiquement à l’installation du comité. Selon les règles, si un chef dit non au Koglwéogo, il ne force pas, mais le leader à nuancé en disant qu’une personne appartient au chef mais reste propriétaire de ses biens. Nous constatons donc que c’est par courtoisie qu’il le disait, sinon dans la pratique, un chef ne peut en aucun cas les empêcher de s’installer. Sur des feuilles imprimées et vendues à deux cent francs CFA l’unité, on pouvait lire ceci :

 

« Ce que nous devons retenir :

 

1- On ne peut pas couvrir un voleur parce qu’il est membre de sa famille.

2- On ne doit pas accuser quelqu’un sans preuve.

3- On ne doit pas tolérer le vol.

4- On ne doit pas laisser produire les jeux de hasard.

5- Les viandes fraudées sont interdites.

6- Les armes illégales sont interdites.

7- Les stupéfiants sont interdits.

 

Le comité est impartial et sans discrimination : la certitude avant toute opération ».

 

Ce sont là les règles du comité Koglwéogo “Tar wend panga” de Sabouri et ses environs, signées par le nouveau responsable Issaka Dindaogo de Tampelga.

 

L’explication des modes opératoires en est suivie par le chef Koglwéogo de Wouga : « Les voleurs ont changé de méthode ; ils tuent les animaux et transportent la viande dans des sacs. D’autres creusent de grands trous dans la brousse qui peuvent contenir des dizaines d’animaux et les gardent vivants dans les trous ; ils passent nuitamment et les prennent petit à petit pour les égorger et emporter la viande. Si vous voyez un troupeau de bœufs avec un ou deux ânes marchant à côté du troupeau, sachez que ce sont des voleurs qui se sont transformés en ânes pour guider le troupeau hors des villages. Prenez les ânes et attachez-les. La faim et la soif vont les amener à redevenir des humains ». Voici autant de révélations qui nous laissent perplexes, et du coup remettent sur la table l’usage de la magie dans certaines situations de vol. Est-ce une réalité ? Nous ne pouvons vous en dire plus, pensez-y ! Nous savons, malgré tout, que la croyance au surnaturel a toujours meublé le quotidien des Africains.

 

C’est au tour de 16h 30 que la cérémonie a pris fin. Les responsables du comité du Centre-Nord ont invité l’assistance à ne pas confondre les Koglwéogo. Nous n’avons pas d’armes, ni de tenues, nous sommes une association reconnue depuis 2012 et nous avons un récépissé. Le responsable du comité Koglwéogo du Centre-Nord nous a invité à jeter un coup d’œil sur leurs documents pour soutenir leur existence légale, ce que nous avons fait. Il a par ailleurs réaffirmé leur volonté de se démarquer des abus que font certains comités, et leur disponibilité à continuer à collaborer avec les Forces de défense et de sécurité, toute chose qui contribuera à la sécurisation des personnes et des biens dans la région du Centre-Nord.

 

  1. Jonas SALOU (Correspondant)

 

 

 


No Comments

Leave A Comment