HomeA la uneMEURTRE D’UN OFFICIER SUPERIEUR PROCHE DU POUVOIR AU BURUNDI : Une mort bien curieuse  

MEURTRE D’UN OFFICIER SUPERIEUR PROCHE DU POUVOIR AU BURUNDI : Une mort bien curieuse  


 

Le 22 mars dernier, un officier supérieur de l’armée burundaise a été assassiné par balles à Bujumbura. Dans un Burundi où la mort a été pratiquement banalisée depuis que le président Pierre Nkurunziza a choisi la voie de la répression pour mettre au pas les contestataires de son troisième mandat, cette mort serait un non-événement si le meurtre ne s’était pas déroulé en plein jour, dans l’une des places fortes du pouvoir de Bujumbura, en l’occurrence les locaux de l’état-major général de l’armée burundaise. Et cela,  sans que l’on puisse mettre le grappin sur l’assassin. Cela est quand même bien curieux ! Surtout que ces événements interviennent au moment où le pays connaît une relative accalmie. D’où les multiples questions que continuent de se poser  de nombreux Burundais sur les circonstances de la mort de cet officier supérieur qui était l’un des hommes les mieux gardés du pays, dans un espace ultra-sécurisé comme le Quartier général du commandement des FDN (Forces de défense nationale). De son vivant et jusqu’à sa mort, le lieutenant-colonel Darius Ikurakure, puisque c’est de lui qu’il s’agit, s’était illustré par sa cruauté dans la répression des opposants au 3ème mandat du pasteur-président. Toute chose qui fait se tourner certains regards vers l’opposition armée qui a décidé de chasser Nkurunziza du pouvoir par la force, pour avoir tordu le cou à la Constitution et aux accords d’Arusha qui lui interdisaient de briguer un autre mandat. Dans l’hypothèse où ce serait eux qui auraient effectivement réussi un tel coup, ce serait non seulement un coup dur pour le pouvoir, mais aussi un avertissement pour le président Nkurunziza qui peut désormais sérieusement craindre pour sa propre vie. Car, comme l’a relevé un diplomate, « ceux qui ont fait le coup viennent de démontrer qu’ils peuvent frapper où et quand ils veulent ».   

 

La mort du lieutenant-colonel Darius Ikurakure est la preuve que les assassinats ciblés ne sont pas prêts de s’arrêter au Burundi

 

Cependant, les circonstances de la mort de l’officier burundais comportent tellement de zones d’ombre que l’on ne peut pas non plus écarter l’hypothèse d’un coup du pouvoir. En effet, l’on a souvent vu des dictateurs se débarrasser, à un certain moment, de certains serviteurs zélés qui représentent, d’une certaine manière, leur mauvaise conscience, après les avoir pourtant utilisés pour leurs basses besognes. Et dans le cas d’espèce, l’extrémisme du lieutenant-colonel dont le nom revenait régulièrement dans les dossiers de disparitions, de tortures d’opposants et de répressions violentes, peut l’avoir desservi. Surtout  au moment où le président Nkurunziza est à la peine avec la communauté internationale qui le presse de toutes parts mais sans succès jusque-là, d’ouvrir un dialogue avec l’opposition. Situation qui lui a même valu la fermeture du robinet financier par l’Union européenne (UE), ce qui n’est pas sans conséquence sur le Burundi. Dans de telles conditions,  si la méfiance devait encore être de mise dans les relations interpersonnelles jusqu’au sommet de l’Etat, ceci pourrait bien expliquer cela. Quoi qu’il en soit, la mort du lieutenant-colonel Darius Ikurakure est la preuve que les assassinats ciblés ne sont pas prêts de s’arrêter au Burundi. Et les conséquences peuvent rendre la situation encore plus dramatique, surtout si l’on doit entrer dans un cycle de violences avec leur lot de vengeances. D’où la nécessité de trouver une solution définitive et durable à la crise burundaise. C’est pourquoi l’on peut regretter la démission de la Communauté internationale dont tout porte à croire qu’elle a complètement baissé les bras, tant elle est devenue aphone après les multiples tentatives de rapprochement auxquelles l’homme fort du Burundi a opposé une fin de non recevoir catégorique. En tout état de cause, l’on peut être sûr que l’opposition et la société civile burundaises, au moins, ne pleureront pas la mort de leur tortionnaire. Certains regrettent tout au plus « qu’il parte sans répondre de ses actes devant la Justice ».

Outélé KEITA


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